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23/07/2013

Retour sur le Tour

Le Tour de France vient de s’achever. Les mêmes images que les ans passés, mais pourtant différentes, les mêmes émotions que les éditions antérieures, mais pourtant différentes. Comme un cercle dont on ferait sans cesse le tour, la Grande Boucle, année après année enrichit l’album de nos souvenirs faits de maillots multicolores et de foules en délire.

Car il s’agit bien de cela, des foules folles de joie et de bonheur, dressant le long des routes leurs barrières mouvantes comme les flots s’ouvrant sous la proue des navires, siglés Saxo Bank ou AG2R, indifférents mais pressés de rejoindre le port avant la nuit. Les étapes de montagne sont particulièrement choisies par les spectateurs et cela est bien normal, c’est le seul endroit où l’on puisse à peu près, les voir passer en file indienne ou du moins en groupes éparpillés, à des vitesses laissant une chance à l’œil humain d’en retenir une grimace ou une trace de sueur sur le front. L’étape de l’Alpe-d’Huez est devenu un cas d’école des plus représentatif.  

Au fil des années les foules sont de plus en plus denses et aujourd’hui, le téléspectateur devant son écran est en droit de s’interroger, que filment les caméras, qui sont les vedettes des retransmissions télévisées ? Sont-ce réellement les coureurs ou bien les spectateurs au bord de la route ?

De plus en plus nombreux, les spectateurs cherchent à tirer la couverture à eux au détriment des cyclistes. Qui porte un costume saugrenu, qui brandit une pancarte avec un message adressé à sa dulcinée ou sa mère, qui agite un drapeau sans rapport avec la course. D’autres, plus économes mais pas moins envieux d’un vedettariat de quelques secondes, courent quasi nus à côté des grimpeurs ayant d’autres chats à fouetter. Passer à la télé, à peine quelques secondes, le rêve ultime qui leur apportera une supposée gloire quand elle aura été relayée par Smartphone sur les réseaux sociaux. On reste interloqué devant de tels comportements.

Tant qu’ils en restent là, ces agités des bas-côtés ne font de tort à personne et, sachant que le ridicule ne tue plus depuis bien longtemps, on peut deviner qu’ils rentreront chez eux sains et saufs. Passant le reste de leur vie, à revoir en boucle sur le magnétoscope leur fameuse étape, « attends, tu vas voir, au virage 18, ça dure quatre secondes exactement, je suis à gauche sur l’écran ! » avec leurs copains et voisins, un peu las de revoir ces images réchauffées pour la nième fois.

Où tout cela devient plus problématique, c’est lorsque l’on voit des spectateurs abrutis ou inconscients, encore que la lisière entre l’un et l’autre soit bien subtile, s’agiter tellement près des coureurs qu’ils en viennent à les toucher à presque les faire tomber. On l’a vu cette année encore dans l’Alpe-d’Huez. Parfois le cycliste fait un écart, trop épuisé ou concentré pour réagir autrement, parfois le coureur réussit à décocher un coup de poing au taré. Chaque escalade de col est devenue un suspense haletant, d’un point de vue sportif mais aussi strictement sécuritaire. Quand la foule réduit le ruban bitumeux à un étroit couloir au milieu d’excités ne s’écartant des roues qu’à la toute dernière seconde, on en vient à prier pour qu’aucun des sportifs ne finisse à terre car ce serait le signal d’un lynchage général, tous voulant un morceau du maillot ou bien du vélo, trophée dramatique qui finirait sur Ebay ou Leboncoin.

A moins qu’on ait un autre désir. Voir enfin un piéton enragé, se faire écraser par une moto ou une voiture suiveuse, ou mieux encore, se faire tabasser par un coureur excédé, descendu de sa fusée à deux roues et dépensant ses dernières forces dans un passage à tabac avec chaîne de bicyclette, du connard l’ayant fait verser. On peut toujours rêver.       

07:00 Publié dans Echos du monde | Tags : tour de france | Lien permanent | Commentaires (0) |  Facebook | | |